reglementation psychotherapeutes amendement accoyer  - formation pour Infirmier de Secteur Psychiatrique - texte de Mme  Aubert-Baudron -

 PAGE D'ACCUEIL DU SITE "PSYCHIATRIE INFIRMIERE"

 

 

 

Réglementation des psychothérapeutes :

Les infirmiers psy sont-ils des soignants ?

 

 

 

 par Isabelle Aubert-Baudron

Extraits concernant les Infirmiers de Secteur Psychiatrique:

... / ...

"Qu'en est-il des psychothérapeutes non-médecins et non-psychologues détenant un diplôme reconnu? Je veux parler des infirmiers de secteur psychiatrique:

Trois années d'étude après le bac sanctionnées par un diplôme, dans le cadre d'hôpitaux psychiatriques publics dénommés  "centres psychothérapiques" et au contact permanent des patients. La formation telle qu'elle était pratiquée avant la  suppression du diplôme d'infirmiers de secteur psychiatrique contenait une année consacrée à l'étude des comportements pathologiques, et une autre à celle de la nosographie psychiatrique. Les cours de psychiatrie étaient donnés
par des psychiatres hospitaliers. Cette formation correspond à celle de la spécialisation en psychiatrie en Belgique (voir l'article comparatif de 2005 sur "la profession infirmière en France et en Belgique").

Pour ce qui est de la pratique enseignée, elle est similaire à celle enseignée aux infirmiers diplômés d'État (qu'on ne vienne pas me dire le contraire, j'avais fait une première année de
D.E. avant de m'orienter vers la psy: le programme était identique; toutefois le contexte de l'école d'infirmiers psy, dont les promotions comprenaient une dizaine d'élèves, était plus adapté que l'école d'infirmiers DE, dont les promotions comprenaient une centaine d'élèves) et le contenu de cette formation donne droit dans les autres pays à l'équivalence du diplôme d'infirmier.

Nous constatons alors que la France a sciemment supprimé une formation d'infirmier psy de qualité au bénéfice d'une formation qui ne donne pas les moyens aux gens de travailler en psychiatrie.

La disqualification des infirmiers psy ne repose pas sur leur manque de qualification: elle a été sollicitée par les syndicats d'infirmiers libéraux suite à l'instauration du "tronc commun", à partir duquel a été supprimée la formation d'infirmiers psy (1992 et 1993). Ces syndicats craignaient une concurrence de la part des infirmiers psy débarquant sur le marché du libéral. Cette disqualification n'a donc pas lieu d'être sur la base des compétences, elle ne se conçoit que dans le cadre d'une concurrence économique. 

Or dans le contexte actuel de la pénurie d'infirmières, cette mesure est proprement inadmissible puisque le nombre d'infirmiers libéraux est largement insuffisant à combler les besoins de la population: les infirmières libérales se plaignent d'être débordées, de ne pouvoir prendre de vacances ni de week-ends. Elles déplorent ainsi une situation qu'elles ont créée de toute pièce, et dont elles subissent aujourd'hui les conséquences, sans pourtant remettre en question cette mesure.

Concernant la validité de cette disqualification, il convient également de considérer les faits: les infirmières libérales n'ont aucun état d'âme à employer des aides soignantes pour les soins de nursing, ce qui est pour le moins paradoxal.

Ce qui pose la question de la demande exprimée et de la demande réelle: la demande exprimée repose sur une exigence de compétences; la demande réelle est bassement matérielle. Le but de la chose consiste à empêcher des gens diplômés de travailler afin de garder le monopole de la clientèle, et de faire travailler des gens moins compétents dont le travail deviendra une source de bénéfices.

Autre spécificité française, les concours d'entrée aux centres de formation infirmiers: avant l'instauration du tronc commun, il suffisait pour entrer dans une école d'infirmière d'avoir le baccalauréat et de s'inscrire. Or depuis, des concours ont été institués, qui éliminent une grande partie des candidats. En Belgique, où il n'existe pas de concours d'entrée, j'ai rencontré des Françaises éliminées en France, qui n'ont eu aucune difficulté à s'inscrire dans les centres de formation infirmiers belges, et qui, à l'issue de leurs études, auront un diplôme qui leur permettra de travailler dans toute la communauté européenne, y compris en France.

En plus de leurs trois ans d'études, les infirmiers psy suivent également des formations complémentaires au titre de la formation continue, dispensées par des organismes tout à fait officiels et reconnus du secteur public, n'ayant rien à voir avec des sectes. Ils peuvent ainsi acquérir un ensemble de connaissances dans divers domaines. Ces formations ne se réfèrent pas à la nosographie psychiatrique, mais à des domaines de connaissance non universitaires, recouvrant les différents courants apparus en psychiatrie depuis les années cinquante et venus pour la plupart des États-Unis: courant systémique, comportementaliste, développement personnel (analyse transactionnelle, sophrologie, relaxation, yoga, rêve éveillé, créativité onirique, etc.), assistance aux personnes en fin de vie... etc. 

Cependant, une fois les gens formés, il leur est souvent difficile d'utiliser ces formations dans le cadre hospitalier, dans la mesure où elles ne sont pas enseignées dans le cadre universitaire et où les autres membres de l'équipe soignante ne les  possèdent pas. Elles se limitent alors au développement personnel des gens qui les suivent, mais ne remplissent pas l'objectif pour lequel elles sont au départ enseignées et payées par les établissements, qui est d'être utilisées comme outils thérapeutiques dans le cadre hospitalier. Le seul cadre dans lequel les gens qui les acquièrent peuvent les utiliser est la profession de psychothérapeute.

Autrement dit, ces formations se heurtent de la part des diplômés universitaires à un raisonnement similaire à celui des infirmiers libéraux: en interdisant aux infirmiers psy l'exercice de la profession de psychothérapeute, le corps médical se réserve le monopole non seulement de la clientèle, mais également celui de la vision de la maladie mentale et des réponses à y apporter. Elle institue une frontière entre d'une part l'enseignement universitaire, considéré comme "seul vrai", et les enseignements non universitaires, considérés a priori comme "faux":

Le rapport sur la pratique de psychothérapie de Pierre PICHOT et Jean-François ALLILAIRE de l'Académie Nationale de Médecine distingue 4 catégories de professionnels se réclamant actuellement du qualificatif de psychothérapeute:

  1. des médecins et psychiatres formés de façon variable au cours de leur cursus aux interventions de niveau 1 et de niveau 2, mais dont l'accès aux interventions de niveau 3 relève d'un choix personnel;

  2. des praticiens médecins ou non médecins (en général psychologues) qui ont acquis une formation de niveau 3 qu'ils exercent de façon exclusive;

  3. des psychologues cliniciens disposant d'une formation universitaire et paramédicale variable suivant leur cursus au sein des structures de soins psychiatriques;

  4. enfin de nombreuses personnes plus ou moins identifiées qui se prévalent d'une formation personnelle acquise auprès d'écoles psychothérapiques variées et exerçant une activité sur laquelle on doit avoir les plus grands doutes et émettre les plus grandes réserves.

Le problème ici n'est pas seulement économique: à ce niveau, le nombre des psychiatres est très inférieur aux demandes de consultations et obtenir un rendez-vous demande souvent plusieurs mois d'attente; le problème est idéologique: ce dont il est question est d'imposer une vision unique des pathologies mentales, basée sur une carte unique du psychisme humain, et de discréditer tout domaine de connaissance non-maîtrisé par le corps médical, et toute expérience indépendante qui pourrait remettre en question la pratique officielle.

Mon propos ici n'est pas de dédouaner tous les psychothérapeutes non-médecins, ni de décrédibiliser la recherche de réglementations dans le domaine des psychothérapies: je suis bien d'accord avec le fait que la situation actuelle n'est pas satisfaisante, et que l'être humain est trop précieux pour être confié à des charlatans. Cependant, la réglementation qui nous est proposée ici par Mr Accoyer sur la base du rapport de l'Académie de Médecine, d'une part ne me semble pas en mesure d'éviter les écueils auxquels elle prétend mettre un terme, et d'autre part me paraît en réalité une tentative de normalisation idéologique de notre univers intérieur par la profession médicale, susceptible d'engendrer des écueils tels que ceux qui ont été déplorés dans l'ex-
URSS, à savoir une utilisation de la psychiatrie à des fins de contrôle de l'individu."

... / ...

 

 

 


 

 

 

 

 

Compléments d'informations (textes ayant pour thème "l'infirmier, la formation et la psychiatrie")

 

Sur les conséquences d'une formation unique infirmière imposée à la psychiatrie par le gouvernement de 1992,

et la suppression des centres de formation spécifique, consulter ci-dessous:

 

Références d'articles ayant pour thème "la participation des infirmiers à la psychothérapie".

 

 

 

Liens utiles:

 

psychothérapie institutionnelle;

la psychiatrie avant le désaliénisme;

charte des droits du patient en psychiatrie;

guide officiel du soin infirmier en santé mentale.

 PSYCHIATRIE INFIRMIÈRE : LE SOIN INFIRMIER

Article de Mme Aubert-Baudron

Infirmière de Secteur Psychiatrique.

Agence de presse Interzone, courant 2004

Reproduit sur "Psychiatrie Infirmière":

http://psychiatriinfirmiere.free.fr/,

références et contact e-mail.

Psychothérapie institutionnelle

et formation infirmière

 PSYCHOTHÉRAPIE INSTITUTIONNELLE ET FORMATION INFIRMIÈRE

 

 

Haut de Page

 

MAJ 04.02.12