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Article paru dans le site "cemea.asso.fr"
Communiqué de presse des CEMEA
– 11 décembre 2008
LA PSYCHIATRIE EN DANGER !
Le désaliénisme (accès au dossier "désaliénisme"), mouvement fondateur de la psychiatrie moderne s’est bâti sur une culture de mort, celle de la disparition de plusieurs milliers de malades
mentaux, morts de faim dans les hôpitaux psychiatriques pendant la période de l’occupation, et celle du désastre des camps de
concentration nazis. La psychiatrie de secteur, née de cette période, héritière des conceptions thérapeutiques liées à la lutte contre la contamination
psychotique asilaire, a érigé en principe la notion de continuité des soins dans la prise en charge de la souffrance psychique de la personne:
continuité comme capacité contenante de l’écoute de celui qui souffre, et continuité comme dispositif des moyens humains de l’équipe soignante sur un territoire et dans une
conception du soin humaniste.
Les CEMEA, dès l’origine (1949), ont été associés à l’élaboration d’une parole soignante infirmière, par les premiers stages en psychiatrie et par la
création de la première revue de psychiatrie, VST
(Vie Sociale et Traitements) en 1954: un espace de paroles des pratiques des équipes de santé mentale.
Aujourd’hui, plus de quarante ans après, lentement, insidieusement, mais sûrement, nous assistons au démantèlement d’une psychiatrie
"au service du public" comme aimait à le répéter L. Bonnafé (accès au dossier "Bonnafé"), au profit d’une psychiatrie au service des approches comportementales et neurologiques
(accès
au témoignage paru en 2004 du Dr E. Zarifian sur le quiproquo de la "psychiatrie
neuro-biologique") et de l’économie la plus libérale qui soit, qui dénient le sujet souffrant dans sa globalité, dans son histoire et sa dignité d’homme.
Aujourd’hui, au nom de la transparence libérale et de la volonté de définir la psychiatrie sur le modèle des autres spécialités médicales, la hiérarchie gestionnaire des symptômes est l’indicateur du curseur des "temps" nécessaires au soin. La dimension culturelle de la souffrance personnelle est bafouée, niant de ce fait la première des atteintes dans les souffrances psychiques: la relation à l’autre.
Conséquences directes de l’abolition du temps comme élément premier du colloque singulier patient/soignant, donc de la diminution de personnels qualifiés, beaucoup de personnes malades se retrouvent trop vite et trop tôt à la rue, démunies, fragilisées sans soin et suivi des équipes soignantes (accès à l'article de 2002 "la psychiatrie souffre du manque de moyens"). Un nombre non moins important, dans la rue, n’a pas accès aux soins. Dans trop de services, faute de temps soignant suffisant, des malades sont sous antipsychotiques à hautes doses. Pour les mêmes raisons de jour en jour des personnes hospitalisées sont soumises plus fréquemment à la contention physique et/ou à l’isolement.
Les dernières déclarations du Président de la
République à Anthony
(accès à l'article d'Infirmière Magazine: "le
discours du 2 décembre 2008 passé au crible") font l’amalgame entre
maladie mentale et délinquance, maladie mentale et dangerosité et sont des atteintes au travail inscrit depuis de
nombreuses années par les professionnels pour la prise en compte des personnes souffrantes (accès
à l'article de Ouest-France de Novembre 2008 : "Le
patient psy est plus vulnérable que violent").
Ainsi, ce n’est pas seulement une réorganisation de la politique de soin qui s’opère, mais c’est bien la mise en place d’une autre conception politique du
rapport à l’autre souffrant de sa folie, cette "pathologie de la liberté", à travers ce que nous pouvons qualifier de
"laminage" du principe de solidarité d’une démocratie laïque.
Les
CEMEA, mouvement militant, engagés dans le champ de la formation, ne peuvent rester indifférents à ces annonces et ces propositions, et les dénoncent
avec force parce qu’elles participent d’une régression notable et d’une politique de la peur.
Communiqué de presse des CEMEA – 11 décembre 2008
Consulter ci-dessous :
les conséquences d'une politique essentiellement économique en santé mentale "information aux usagers" et "quels soins pour la psychiatrie?;
l'article "privatisation et économie de marché appliquées à la psychiatrie" d'Isabelle Aubert-Baudron, février 2003;
l'article "refusons la politique de la peur", Globule Rouge, janvier 2009.
la charte de "l'Appel des appels", Collectif National, février 2009.
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