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14 Mars 97 - POLITIQUE

La psychiatrie en danger,

les infirmiers sont dans la rue

par CAROLINE CONSTANT.

Article paru dans l'édition du journal "l'Humanité" du 14 Mars 1997

(également disponible sur le site de "l'humanité" )

 

"Près de 8.000 infirmiers psychiatriques, venus de toute la France, ont manifesté hier à Paris. Ils protestent contre la remise en cause de leur diplôme (accès à l'article de 1999 sur la "directive européenne"). Au-delà, ils dénoncent le démantèlement du secteur psychiatrique français au nom de l'Europe".

 

... / ... 'La psychiatrie, c'est un espace de parole et de tolérance. C'est l'apprentissage de la différence de l'autre.' Magali, queue de cheval blonde au vent, est venue de Marseille pour défendre son diplôme d'infirmière psychiatrique, remis en cause par un arrêté du conseil d'État le 30 décembre dernier (accès à l'interview du psychiatre Jean Oury dénonçant le "scandale de la suppression du diplome ISP").

Au-delà de la reconnaissance de leur qualification, les 8.000 à 10.000 infirmiers psychiatriques (2.000 selon la police), venus de toute la France, qui ont défilé hier dans les rues de Paris, ont fait état de leur inquiétude sur l'avenir de ce secteur. En fin de manifestation, des infirmiers ont bloqué l'immeuble des représentations de la Commission et du Parlement européen, boulevard Saint-Germain.

... / ... Dans le cortège coloré, badges et banderoles martèlent que "déqualifier les infirmiers, c'est sous-estimer les malades mentaux". Un mot d'ordre que Pascale, blouse blanche et regard mécontent derrière ses lunettes, partage. Elle, qui travaille depuis vingt ans en hôpital psychiatrique à Caen (Calvados), estime que "la remise en cause du diplôme d'Etat pour les infirmiers psychiatriques est inadmissible: nous avons la même formation de base que les infirmiers généralistes. Et surtout, la psychiatrie est une discipline à part entière. Elle ne s'improvise pas".

Frédéric avance sur les bords de la manifestation. En écartant ses longs cheveux bruns, cet infirmier de Paul-Guiraud à Villejuif (Val-de-Marne) complète le propos: "On mérite de porter le titre d'infirmier. Mais au-delà, c'est un besoin: nous assurons tous les jours des soins thérapeutiques aux malades." Sans compter, rajoute le jeune homme, que "décréter que 58.000 infirmiers ne le seront plus à l'avenir, cela signifie bloquer nos évolutions de carrière et nos salaires. En définitive, le gouvernement réalise des économies sur notre dos".

Un peu plus loin dans le cortège, André distribue des tracts aux passants. "Le DEI nous permet d'exercer notre métier, d'appliquer des soins aux patients en toute légalité. Mais un simple acte, comme un prélèvement sanguin, ne nécessite pas le même travail de dialogue et d'approche en psy et en hôpital général" (accès ici à un "témoignage sur la formation psychiatrique" dans les Instituts de Formation en Soins Infirmiers).

... / ... Mais l'inquiétude sur l'avenir de la psychiatrie perce dans tous les discours (accès au témoignage du Dr Courtial de juin 2005 sur la soumission et la collaboration de la psychiatrie: "au secours, ils sont devenus fous!"). Pascale rappelle que, en Angleterre, les malades mentaux sont à la rue. Frédéric insiste sur le fait qu'en Italie toutes les structures d'accueil en psychiatrie ont été démantelées dans les années soixante-dix. "Nous sommes une exception en Europe. Et c'est aussi au nom de l'Europe qu'on veut gommer notre spécificité", reprend Frédéric (accès au témoignage de J.P. bat, infirmier spécialisé dénonçant en mars 2000 cette "perte de spécificité psychiatrique").

Plusieurs établissements, comme Maison-Blanche, en Seine-Saint-Denis, sont d'ores et déjà menacés de fermeture. D'autres subissent des réductions de budget drastiques et beaucoup ferment des lits. "Nous sommes déjà en sous-effectifs. A tel point que des patients, dans certains services, se révoltent", avoue Christine, de l'hôpital Esquirol. Avant de conclure: "sacrifier la psychiatrie représente un danger pour la société. Privés de structures d'accueil, où vont aller nos malades"?

 

 

CAROLINE CONSTANT.

 

 


 

 

 

Sur les conséquences d'une formation unique infirmière imposée à la psychiatrie par le gouvernement de 1992, et la suppression des centres de formation spécifique, consulter ci-dessous:

 

 

 

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