Alerte en psychiatrie: les etats generaux sont convoques.

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Les infirmiers psychiatriques: 58 000 infirmiers équivalents temps plein exercent

actuellement, pour environ 65 000 lits. Ils réclament la ré-instauration d'une formation

spécifique à la psychiatrie, qui a été supprimée en 1994 (accès au dossier "formation spécifique ISP").

(article paru dans l'édition du monde du lendemain, le 07.06.03, consultable sur le site du "Monde")

 

 


 

 

Extraits de l'article du 6.06.03 relatif aux états généraux de Montpellier

(accès au second article du 6.06.03 et à l'article du Monde du lendemain, le 7.06.03)


 

"La psychiatrie française se penche sur ses propres maux"

 

 


Les premiers États généraux de la psychiatrie se tiennent à Montpellier du jeudi 5 juin au samedi 7 juin 2003. Réunissant entre 1 500 et 2 000 participants (médecins, infirmiers, travailleurs sociaux...), cette manifestation a pour but d'alerter les pouvoirs publics et l'opinion sur la crise grave que traverse la spécialité...
 

Le président du comité scientifique des États généraux s'inquiète d'une disparition de la relation thérapeutique au profit d'une "médicalisation à outrance de la souffrance psychique"...
 

L'événement, exceptionnel, se veut un jalon dans l'histoire de la psychiatrie. Pour la première fois depuis l'invention de cette discipline, au XIXème siècle, la Fédération française de psychiatrie et des psychiatres, des internes, des psychologues, des infirmiers psychiatriques et des travailleurs sociaux intervenant en santé mentale (accès au dossier "santé mentale") se réunissent, du jeudi 5 au samedi 7 juin, à Montpellier (Hérault) dans le cadre des États généraux de la psychiatrie.
 

La profession cherche à alerter les pouvoirs publics et l'opinion sur la crise grave que traverse la spécialité... La psychiatrie publique a subi de profondes évolutions depuis la Libération. Aux anciens asiles, elle a substitué, à partir des années 1960, une politique de soins plus ouverte sur la société, la "sectorisation". Travaillant dans des bassins de population d'environ 70 000 habitants (les "secteurs"), les psychiatres ont multiplié les petites structures de soins ambulatoires...
 

L'ouverture des secteurs s'est faite à des vitesses très différentes, et surtout, cette ouverture sur l'extérieur a entraîné une chute du nombre de lits d'hospitalisation.

S'appuyant sur la politique de sectorisation, les pouvoirs publics ont en effet encouragé la réduction progressive du nombre de lits: 125 000 places d'hospitalisation ont été supprimées entre 1970 et 2000, avec une accélération dans les années 1990. "L'enthousiasme des psychiatres pour la création de soins en ambulatoire a été un peu trop loin, analyse le docteur Jean-Jacques Laboutière, secrétaire général de la "Fédération française de psychiatrie". Du coup, la tutelle a accompagné et utilisé ce mouvement pour faire des économies" (accès à l'article de 2002 "la psychiatrie souffre du manque de moyens").

LISTES D'ATTENTE

 


En 2001, la France ne disposait plus que de 64 718 lits, dont 80 % dans le secteur public. Un hôpital comme celui de Maison Blanche, à Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis), est passé de 2 000 lits dans les années 1980 à 550 aujourd'hui. "Nous n'accueillons plus que des patients en phase très aiguë et, pour les hospitaliser, il nous faut sortir d'autres malades", déplore ainsi Serge Klopp, cadre infirmier...
 

Cette politique est jugée d'autant plus excessive que le nombre d'hospitalisations a recommencé à progresser depuis 1997. "On en est à faire la chasse aux lits pour pouvoir hospitaliser les patients. Ces malades sont sortis dès qu'ils présentent un semblant d'amélioration, explique Alain Létuvié, du Syndicat national des psychologues. Avant, on dénonçait les internements abusifs, dorénavant on peut vraiment parler d'externements abusifs."

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Traditionnellement soignés dans les hôpitaux, des malades mentaux psychotiques échappent ainsi de plus en plus au système de soins (accès à l'article de 2005 "débat après le meurtre de Pau").
 

Aujourd'hui, la psychiatrie est donc placée dans une situation paradoxale: alors que ses moyens ne cessent de diminuer (le nombre de psychiatres devrait baisser de 12 500 aujourd'hui à 7 500 en 2020), son champ d'intervention s'étend...
 

"On voit arriver chômeurs, RMiste, stagiaires en tout genre, population dont la principale caractéristique est d'être sous le signe du manque, écrivaient déjà en 1997 la sociologue Anne Golse et le psychiatre Philippe Plichart dans 'Psychologie sociale et ethnopsychiatrie'. Enfin, nouvelle catégorie en extension, les demandes qu'on peut qualifier de subjectives, demandes personnelles de mieux-être face à une angoisse diffuse, un sentiment de vide ou d'échec personnel, de perte de l'élan vital ou d'une capacité à entretenir des liens sociaux."

 

"L'ÈRE DU BRICOLAGE"

 

Les participants aux États généraux s'inquiètent ainsi de la tendance à la rationalisation des soins, qui touche tous les secteurs de la santé. "On n'a plus le temps de rencontrer le sujet et de construire quelque chose en fonction de son histoire, s'inquiète M. Létuvié. Nous sommes dans l'ère du zapping et du bricolage permanent. Il y a une telle pression de la demande qu'on est de plus en plus dans la gestion de population."

Le rassemblement de Montpellier est aussi l'occasion d'une défense de la relation thérapeutique, dans un contexte où les conceptions anglo-saxonnes de la psychiatrie, qui privilégient les traitements chimiques, gagnent du terrain. "Hâte-toi lentement de comprendre, voilà comment on pourrait résumer notre pratique, explique le docteur Alain Besse, président du Syndicat national des psychiatres privés. Nous ne sommes pas contre les médicaments, mais nous privilégions les thérapies de la parole (accès au dossier "thérapie en psychiatrie"). En aidant quelqu'un à comprendre son symptôme et en le réintégrant dans son histoire, on l'aide bien mieux qu'avec tous les psychotropes."

 

Cécile Prieur

 

 

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