GUIDE DU SERVICE INFIRMIER
- l'évolution des orientations en santé mentale et la fonction infirmière -
Chapitre 5 |
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Références législatives et réglementaires en santé mentale |
La population et la santé mentale |
La fonction infirmière en santé mentale |
Les différentes structures de soins et la pratique infirmière |
Adéquation entre besoins en santé mentale et service infirmier |
Adaptation des personnels à l'évolution et à la transformation du dispositif psychiatrique |
Le service infirmier et l'évaluation |
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L'ADÉQUATION ENTRE LES BESOINS EN SANTÉ MENTALE ET LE SERVICE INFIRMIER
LE SERVICE INFIRMIER ET L'ÉVALUATION
La notion d'évaluation
Utilisée dans les pays anglo-saxons dès les années soixante, la notion d'évaluation dans le domaine de la santé apparaît en France dans les années soixante-dix.
Entre 1970 et 1982, les dépenses de santé sont multipliées par sept et la part de l'hospitalisation passe de 37% à 52% du volume de ces dépenses.
Les pouvoirs publics se penchent sur ce phénomène et de nouvelles approches an matière de gestion des institutions hospitalières sont proposées, d'autant plus qu'en parallèle se développe la crise économique.
En 1983, le 9ème plan de développement économique et social, dans le domaine de la santé, se fixera pour objectifs:
de "moderniser le système de soin",
de "mieux répondre à la diversité des besoins et des aspirations de la population en matière de santé",
de "maîtriser l'évolution des dépenses".
et pour l'un de ses buts principaux:
de "mettre en place une gestion efficace s'appuyant sur une connaissance plus précise des besoins et activités de santé et faisant appel à des instruments nouveaux de gestion, d'évaluation et de contrôle".
Le 10ème plan poursuit cette politique. Ainsi, dans le chapitre "améliorer sensiblement la maîtrise des dépenses de santé", il est souligné que "la promotion d'un bon usage des soins suppose un renforcement de l'effort consacré à l'évaluation des pratiques thérapeutiques et à la diffusion des résultats obtenus dans ce domaine".
Après avoir mis l'accent sur l'évaluation de l'efficacité de la gestion, c'est sur l'évaluation des soins que s'oriente le 10ème plan.
L'évaluation économique est nécessairement liée à l'évaluation clinique. La recherche d'une qualité optimale doit prendre en compte le coût économique et les modes de gestion sachant que ce coût économique n'est pas forcément en adéquation avec la qualité des prestations.
Le concept d'évaluation
Évaluer, dans sa définition la plus simple, consiste à "apprécier, estimer une valeur; porter un jugement sur la valeur, classer par rapport à d'autres éléments de la même espèce donnée" (dictionnaire Petit Robert, mars 1990).
Évaluer nécessite donc de recueillir des données et de mesurer des résultats par rapport à des normes ou objectifs prédéterminés pour en apprécier l'utilité et l'efficacité.
La procédure d'évaluation ne s'arrête pas à cette étape. Elle doit conduire à des prises de décision, à des propositions pragmatiques et dynamiques pour améliorer les produits et les activités afin de réduire les écarts par rapport aux normes et objectifs définis et/ou aux insatisfactions.
L'évaluation permet une amélioration du rapport qualité/prix d'un produit. Elle doit être continue et nécessite des personnes qualifiées pour sa réalisation.
Tous les acteurs concernés participent à l'élaboration des méthodes et des moyens mis en place par un système d'évaluation afin de se l'approprier. De même, les résultats après traitement et analyse doivent leur être restitués. Dans ces conditions, l'évaluation devient un moyen d'évolution, de changement, d'amélioration de la qualité des prestations voire de maîtrise de la gestion.
Aucune entreprise ne peut aujourd'hui faire l'économie d'un programme précis d'évaluation de ses activités.
Dans le domaine de la santé, une évolution psychologique des individus est nécessaire pour accepter la remise en cause de leur pratique afin d'en améliorer la qualité et l'efficacité. Si une première approche est souvent inscrite dans une logique budgétaire et de gestion (notamment en matière d'organisation des soins et du travail), il est indispensable, parallèlement, d'y intégrer une recherche d'évaluation des activités médicales et infirmières tant au niveau quantitatif que qualitatif.
L'évaluation quantitative
La démarche d'évaluation quantitative des soins en psychiatrie n'est ni spécifique ni nouvelle. Dans ce domaine Philippe Pinel recommandait déjà une évaluation périodique des soins offerts afin de pouvoir rechercher les meilleures modalités thérapeutiques.
Les projets, les types d'actes, les intervenants, le nombre de personnes suivies sont les principaux domaines à analyser pour caractériser l'activité psychiatrique.
La combinaison de l'ensemble de ces éléments permet d'effectuer l'analyse de la plus grande partie des prestations réalisées.
L'évaluation qualitative
L'évaluation de la qualité des soins comprend l'évaluation des techniques et des stratégies diagnostiques et thérapeutiques. Elle permet:
de mesurer l'efficience et la probabilité de survenue d'effets négatifs,
de faire des choix dans une situation donnée entre des techniques ou des procédures ayant les mêmes effets,
d'assurer aux personnes soignées le meilleur résultat au meilleur coût en terme de santé.
Cette évaluation nécessite un système d'information extrêmement précis. Ces informations sont obtenues à partir du recueil de données déterminées à l'avance, écrites et auxquelles une situation de soin précise doit répondre.
Pour cela, il est nécessaire de clarifier le contenu, la finalité des soins et la procédure ce qui constitue une des difficultés majeures de l'évaluation qualitative en psychiatrie.
Ces modèles ainsi établis par les professionnels doivent être reconnus et admis par les soignants qui auront à les utiliser.
L'évaluation consiste alors à examiner si les résultats obtenus pour un soin donné correspondent aux résultats préétablis et si non, pourquoi?
Un modèle n'est cependant pas définitif ni figé mais évolutif compte-tenu de l'évaluation.
L'évaluation quantitative aussi bien que qualitative nécessite la mise en place de systèmes d'informations et de recueils de données rigoureux.
Il faut définir très précisément, avant toute mise en place d'évaluation:
les indicateurs pertinents,
les méthodes de recueil et
le champ du recueil.
Il est nécessaire de déterminer les méthodes de traitement des informations, les destinataires des analyses, la diffusion et les limites des résultats.
Un énorme travail est à développer dans ce domaine. En psychiatrie, la fiche par patient est un bon support de départ qu'il convient d'affiner, d'améliorer et de développer.
La circulaire du 14 mars 1990 relative aux orientations de la politique de santé mentale développe le thème de l'évaluation: "l'évaluation de l'activité est aujourd'hui indispensable en psychiatrie comme dans les autres disciplines même si elle est en ce domaine particulièrement difficile. Elle ne pourra se réaliser que progressivement. Actuellement, il s'agit surtout de susciter un esprit, initier un mouvement".
Tout projet, toute transformation peut et doit désormais s'assortir d'un protocole d'évaluation conçu d'emblée par ses promoteurs et comportant au minimum:
un constat explicite sur les besoins à satisfaire,
une indication des hypothèses ayant permis de définir les bases techniques du projet et, si possible, des objectifs précis,
un choix de quelques critères se rapportant aux hypothèses et objectifs, servant d'indicateurs,
une méthode de recueil d'informations propre à permettre de suivre l'évolution de ces indicateurs,
la programmation des bilans qui permettront de vérifier les hypothèses de départ, ou de mesurer l'atteinte des objectifs et d'améliorer ou transformer en conséquence le service rendu.
Le Département d'Information Médicale est la structure qui doit impulser, dynamiser, soutenir les projets d'évaluation et de recherche dans laquelle les personnels soignants doivent pouvoir s'intégrer.
- http://psychiatriinfirmiere.free.fr/ - "Guide du service infirmier de 1991" - Ministère des affaires sociales et de la solidarité - Direction des hôpitaux -