Carl Jung      - formation pour Infirmier de Secteur Psychiatrique - cours de Mr Giffard -

 FORMATION DE BASE POUR SOIGNANT

 

Carl Gustav JUNG

 

 

Carl Gustav JUNG (1875-1961)                                                   

 

Carl Gustav Jung est né à Kesswil, sur la rive Suisse du lac de Constance. Son père, pasteur, s'installa peu après à Schlosslaufen, au bord de la chute du Rhin, puis à proximité de Bâle. C'est dans cette ville qu'il fit ses études et acquit le titre de médecin. Il entre alors à l'hôpital psychiatrique du canton de Zurich. Il y est élève, puis assistant de Bleuler. Après avoir soutenu sa thèse sur la "psychopathologie des phénomènes dits occultes", il y prépare ses premières publications: "études sur les associations"(1903) et "les démences précoces"(1907). Cette même année, il devient disciple et ami de Sigmund Freud, qu'il quitte cinq ans plus tard pour fonder une nouvelle école de "psychologie analytique". Il fonde en 1948 l'institut "JUNG" à Zurich.

 

Découverte de "l'inconscient collectif", fondement de l'imagination, commun à tous les peuples à travers les âges, et qui se manifeste dans les religions, les mythes, l'alchimie...

 

Jung a beaucoup voyagé en Afrique noire, en Afrique du nord, aux Indes et en Amérique où il étudia particulièrement les coutumes des Indiens "Pueblos". Il s'efforça toute sa vie de dépasser une attitude purement descriptive de la maladie mentale et de la comprendre de l'intérieur.

S'il fut d'abord attiré par les travaux de Freud (avec qui il se lia d'amitié durant 5 années), l'esprit de système de son aîné l'éloigna peu à peu de lui; Jung ne pouvait accepter une conception de l'énergie psychique (la libido) limitée, pour les besoins d'une théorie, à l'impulsion sexuelle.

 

La rupture survint après la parution de "métamorphoses et symboles de la libido" en 1912 dans laquelle Jung exposa sa théorie sur la notion de l'inconscient collectif. Il décrit une structure quaternaire de la psyché, avec 4 fonctions psychologiques caractérisant les différents types humains:

  1. Pensée ;

  2. Intuition ;

  3. Sentiment ;

  4. Sensation .

Ces 4 fonctions forment un instrument que l'individu doit manier pour évoluer.

 

Sa vision de l'homme est dynamique, et on peut la résumer par ces 2 concepts: le devenir, et la transformation.

En l'homme, le monde devient conscient de lui-même par la formation d'un Moi. Mais le renforcement unilatéral de ce dernier ne doit pas dépasser une certaine limite. Au delà, le Moi tend à oublier son lien avec l'océan d'où il sort, l'arbre se sépare de ses racines, se dessèche ou produit des fruits monstrueux. Sur le plan collectif ce seront alors des déchaînements sauvages: les exemples abondent au 20ème siècle. Chez l'individu, c'est la névrose, affection mentale où l'inconscient, nié, réclame sa part. La névrose n'est donc pas liée uniquement à des évènements du passé notamment infantiles, comme pour Freud, mais à une situation actuelle. Rétablir le passage sans heurt du courant psychique, source de renouvellement, tel est le but de l'exploration intérieure.

 

La persona : c'est la partie de nous, apparente, éclairée, que l'on montre aux autres. C'est notre Moi social.

L'ombre : partie inconsciente de notre personnalité, non exposée à la lumière. Ce sont toutes les potentialités que nous n'exploitons pas, mais pas forcément que nous réprimons.

 

Il existe un équilibre entre la "persona" et "l'ombre" car sinon rien de spontané ne pourrait avoir lieu. Ils dépendent tous deux du contexte socioculturel.

 

L'inconscient collectif : ses modes de manifestation sont les "archétypes" qui désignent les images anciennes (comme le "dragon", le "paradis perdu"...). Ces images constituent un fond commun à toute l'humanité. Dans chaque individu on les retrouve, en tout temps et en tout lieu, à côté des souvenirs personnels. Ils se manifestent dans les rêves, les délires et les arts picturaux.

 

Jung distingue plusieurs strates dans l'inconscient collectif:

 

Les archétypes : ce sont des structures de base, un cadre général où l'inconscient collectif s'exprime. Ils sont innés, immuables et les mêmes pour tout le monde. Ce sont les contenus de l'inconscient. Les archétypes sont les formes "a priori" de la représentation. Il y a ainsi les archétypes parentaux (Père et Mère), l'anima, l'animus... etc.

 

Tout le travail de Jung s'est appuyé sur la double question qui domina sa vie: "qu'est-ce que le monde?" et "qui suis-je?". L'insuffisance du cadre religieux éclata aux yeux de ce fils de pasteur. Il devina que la réponse se trouvait au-dedans de lui et non au-dehors.

La psychiatrie lui parut offrir un moyen plus propice d'aborder la totalité de l'Homme. Jung a également travaillé sur la recherche alchimique. Il relia ainsi la mythologie, l'archaïque au psychologique: dans la transformation alchimique du fer en or, c'est la transformation de quelque chose en nous que l'on tente. C'est la transformation de la personnalité.

 

Jung fut avant tout le témoin d'une réalisation interne. Sa méthode psychologique et son œuvre sont les fruits de cette réalisation. Adolescent, il a rencontré sur son chemin la figure fascinante de Zarathoustra, le "messager du surhumain" qui avait conduit à la folie Frédéric Nietzsche, Bâlois d'adoption comme lui. À son tour il s'est vu contraint par le destin d'affronter ce qui est en définitive, l'unique problème de l'âme moderne: l'homme peut-il être surmonté, et par quelle voie?

                                                                                    

                                                                               

Méthode thérapeutique

 

Afin de rétablir le passage du courant psychique, il faut pratiquer l'exploration intérieure. Pour y parvenir, Jung n'a guère recours à des techniques, capables à ses yeux de préjuger du résultat. Sa méthode est définie par "l'Auseinandersetzung", confrontation, échange sans dérobade entre deux personnalités. Une attitude objective, neutre, n'est pas de mise de la part du praticien. Seul un sujet peut aider un sujet, dans son drame et non à côté. Jung accorde par la suite, comme Freud, une importance capitale au transfert qui est le lien affectif unissant le praticien et le patient. Mais loin d'être, comme pour ce dernier, la simple projection d'une image parentale du patient, le transfert  joue pour Jung, à partir du praticien, le rôle actif d'un catalyseur en vue de la manifestation des contenus inconscients. Pour être efficace, il présuppose donc un accomplissement personnel du psychiatre ou du psychologue.

 

Aux yeux de Jung, la portée de la psychothérapie est aussi variée que la nature humaine. On ne peut lui assigner de but. L'évolution psychologique est essentiellement imprévisible. Les intentions et les voies de la nature ne sont pas les nôtres. La disposition requise à leur égard est donc une attention vigilante alliée à une totale disponibilité.

 

Auprès de la "petite psychothérapie" qui tend à la guérison de symptômes comme l'obsession, la phobie, l'inhibition... et dans laquelle les découvertes cliniques de Sigmund Freud ont leur place, le praticien peut se trouver engagé dans une "grande psychothérapie", entreprise de longue haleine qui ne vise pas que la transformation de la personnalité. Jung ne se contente pas de rétablir une norme qui reste pour lui à définir.

La thérapeutique de Freud, quant à elle, vise à faire venir à la conscience les contenus personnels inconscients qui, pour avoir été oubliés ou refoulés, troublent la vie consciente.

 

Voyant dans l'inconscient une énergie pré-existant au Moi, Jung ne fixe pas de limites à sa poussée en vue de son actualisation et accueille toutes les formes de réalisation possibles. Il demeure seulement attentif à sauvegarder le contrôle du Moi conscient. Il se garde aussi de réduire la valeur des matériaux mis au jour. De telles attitudes ne feraient que masquer notre ignorance. Si un grand poète a été névropathe, cela ne touche en rien au mystère de son génie, car tous les névropathes ne sont pas des grands poètes. La reconnaissance dans l'Homme d'une dimension qui "dépasse infiniment l'homme", limité à l'égo, caractérise la psychologie analytique, dite "complexe" ou "des profondeurs" par opposition à la psychanalyse Freudienne.

 

 

Dynamisme des images oniriques

 

Le rêve est pour Jung, comme il l'est pour Freud, la "voie royale" menant à l'inconscient. Jung professe le plus grand respect à l'égard du songe et de son message. Le rêve révèle l'existence d'un psychisme objectif, d'une sagesse naturelle qui tend à l'auto-régulation de la psyché, et dont il est la voie. Il traduit l'état de l'inconscient à un moment donné et exerce normalement une fonction de complémentarité par rapport aux attitudes conscientes. C'est une production naturelle qui doit être examinée comme telle.

 

Les symboles qu'il met en œuvre pour peindre une situation ne sont pas uniquement des signes, des allégories créés par une fonction  de censure servant à dissimuler des figures de l'état de veille, ce qui est la conception Freudienne. Ce sont des images qui ont leur raison d'être en elles-mêmes et possèdent leur dynamisme propre. Leur signification excèdera toujours les interprétations que l'on peut en donner, car le propre du symbole est précisément de mettre le conscient en contact avec ce qui est "inconnu et à jamais inconnaissable".

 

Le rêve formant un tout complet, son sens ne doit pas être recherché au moyen de libres associations qui nous écartent de lui (méthode Freudienne), mais chaque symbole demande à être éclairé à l'aide du contexte onirique et vital. La nature autonome du symbole, ainsi que l'existence d'un inconscient collectif permettent d'inviter le rêveur à passer au-delà de ses associations personnelles. Il pourra alors examiner toute la portée possible de l'image proposée à sa conscience en utilisant les matériaux historiques qui s'y rapportent. Cette opération est appelée "amplification".

 

Les symboles peuvent encore apparaître à l'état de veille sous forme de fantasmes, d'impressions visuelles ou auditives. Une mention spéciale doit être faite de l'imagination active. Elle consiste à fixer l'attention sur une image empruntée à un rêve et à en examiner la libre évolution. L'imagination active, où le Moi joue le rôle de témoin vigilant, est aux antipodes de la rêverie. Elle peut fournir un instrument de choix en vue de la maturation des situations oniriques. Les plus belles images demeureront vaines tant que le Moi ne les aura pas faites siennes par un acte qui sera, suivant le cas, interne ou externe. C'est alors seulement que l'on pourra parler d'intégration, de réalisation psychologique.

 

 

Inconscient collectif et individuation

 

Par la voie une et multiple de l'image, l'homme pénètre progressivement dans les cercles qui le mènent vers le centre de son être intérieur. Le premier rencontré est celui de la "persona" (en latin, c'est le masque du comédien). Ce terme désigne ici le personnage social qui, s'il a l'utilité et le caractère indispensables d'un vêtement, risque bien souvent de nous dissimuler notre nature individuelle. Il faut ensuite affronter et intégrer "l'ombre", partie de nous-même constituée par nos défauts et les produits de la fonction psychologique la moins différenciée. L'ombre a cependant un sens plus vaste et peut également désigner l'inconscient dans son ensemble. En effet, tout ce qui n'est pas entré dans la lumière de la conscience apparaît comme rempli d'obscurité et de menace. Jung applique à la plongée dans l'ombre l'expression de "mort volontaire" qu'il emprunte à Apulée parlant des mystères d'Isis. Mais au-delà de la porte étroite, on débouche dans "une immensité sans limites, une indétermination inouïe". 

 

Avec l'entrée dans cet infini, océan d'énergie antérieur à l'individu, Jung franchit un pas que Freud n'avait pas osé faire. Par opposition à l'inconscient personnel, il le nomme inconscient collectif. Son exploration n'est pas sans danger: les énergies qui font alors irruption dans la conscience inondent l'être, tel un déluge. On assiste à un "abaissement du niveau mental" pouvant aller jusqu'à la dissolution de la conscience pendant laquelle le psychologue tient, grâce au transfert, la place d'un Moi de substitution.

 

Les contenus de l'inconscient collectif, ses modes de manifestation sont les archétypes. Plutôt que des structures préformées, ce sont des virtualités (potentialités) formatrices qui modèlent la matière indifférenciée fournie par le flux de l'énergie psychique. Ce sont de purs dynamismes qui se présentent sous des formes extrêmement variées, mais contenant toutes une forte charge émotionnelle.

Cette charge est à la fois positive et négative: l'archétype est simultanément l'indispensable facteur de l'évolution intérieure et, par la fascination qu'il exerce, une puissance captatrice, un "ogre" redoutable. La vie de l'homme toute entière est dominée et comme aimantée par les archétypes. Les plus puissants d'entre eux sont, sans conteste, ceux des parents.

 

L'anima est au suprême degré la puissance qui arrache l'homme à son univers relationnel. C'est pourquoi elle apparaît souvent en premier lieu comme la séductrice, le fauteur de désordre. Certains types d'anima demeurent ainsi purement négatifs et aliènent entièrement celui qu'elles entraînent. Mais, peu à peu l'harmonie naît du chaos: l'anima montre son visage d'initiatrice. L'intégration de l'anima chez l'homme, de son homologue l'animus chez la femme, conduit à la réalisation intérieure de l'androgyne mythique. Comme tout ce qui relève de l'inconscient collectif, les archétypes ne sont pas séparés les uns des autres par des limites rigoureuses. Il existe entre eux des parentés, des contaminations, des passages. Ils se manifestent non seulement à l'intérieur mais aussi sous forme de situations où l'évènement extérieur se trouve en correspondance avec une donnée psychique. L'archétype doit être considéré comme un facteur (non pas psychique mais "psychoïde"), dans lequel on peut voir le pont reliant le monde intérieur et le monde extérieur. Il façonne à la fois la psyché et le continuum espace-temps.

 

L'apparition de l'inconscient collectif et de ses messages au premier plan des préoccupations contemporaines constitue pour Jung la voie par laquelle la nature s'efforce de résoudre un grand problème: le développement prodigieux de la conscience claire a eu pour contrepartie la mise en jachère du domaine de l'âme, de l'irrationnel, relégués au rang de résidu de l'âge mythologique. L'intellect a usurpé la place de l'esprit créateur et celui-ci doit être recherché non plus en haut, telle une flamme, mais dans les profondeurs où se trouvent les eaux, ainsi qu'en témoignent les rêves de nombreux hommes d'aujourd'hui. Les plus beaux triomphes de la science ne sauraient compenser cette perte d'âme. L'homme, une fois seul avec lui-même, se sent dans un état d'indigence spirituelle, génératrice de déséquilibre: "la névrose, écrit Jung, est la souffrance d'une âme qui a perdu son sens".

 

L'individuation conduit au retrait des projections. L'homme dépouille le monde extérieur de son pouvoir de fascination et parvient à l'autonomie. A la loi arbitraire du Moi et des influences extérieures, se substitue une règle interne. Le nouveau centre appelé Soi est situé au-delà du Moi qui occupe par rapport à lui la position d'un satellite. Comparant les symboles du Soi et ceux qui expriment la divinité dans les religions et les mythes, Jung conclut que le Soi est identique à l'image de Dieu dans l'âme...

 

 

Il existe depuis 1948 à Zurich, un institut C.G. JUNG qui assure la formation des praticiens. L'école Jungienne a des représentants un peu partout dans le monde.

 

 

 

Liens utiles:

 

Arthur Janov;

Wilhelm Reich;

ethnopsychiatrie: définition;

concepts freudiens: définitions et théories;

 PSYCHIATRIE INFIRMIÈRE : COURS DE PSYCHIATRIE

Mis à jour par Mr Dominique Giffard,

pour le site "Psychiatrie Infirmière":

http://psychiatriinfirmiere.free.fr/.

Contact: références et e-mail.

 

bibliographie

 

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